La loi Duplomb va rendre l’avenir ingouvernable autrement que par le mensonge, la dissimulation ou l’attrition des normes sanitaires
Chronique de Stéphane Foucart,
le dimanche 1er juin 2025
L’affaire des eaux minérales Nestlé montre que,
face aux conséquences sociales et économiques
de dégradations irréparables de l’environnement,
l’État peut-être poussé au dévoiement.
« Vous, vous êtes journaliste :
vous écrivez votre papier et ensuite vous vous en lavez les mains.
Nous, on a la réglementation à faire respecter,
mais en face des milliers d’emplois qui dépendent de la décision.
Et là, je ne sais pas comment faire. »
À bien des égards, l’affaire Nestlé est une parabole.
Une surexploitation des milieux, trop de pesticides,
trop de nitrates, trop de matière fécale,
des sols trop dégradés : à un moment ou à un autre,
les conséquences ne peuvent plus être ignorées.
Ce texte prévoit – au bénéfice d’une petite minorité d’exploitants –
de réautoriser des substances interdites, de favoriser les élevages
hors sol, de stocker toujours plus d’eau dans des mégabassines,
de détruire des zones humides.
Les conséquences sont évidentes : davantage de pesticides,
de nitrates, de lisier épandu sur des sols toujours plus secs et,
donc, toujours plus dégradés.
Les conséquences sanitaires et environnementales du texte
sont connues, mais l’affaire Nestlé donne à voir une autre dimension
de son potentiel disruptif, sur le fonctionnement même de l’Etat.
La loi Duplomb fera bien plus que porter atteinte à la santé
et à l’environnement : elle va rendre l’avenir ingouvernable
autrement que par la duplicité et le mensonge, la dissimulation
ou l’attrition des normes sanitaires, c’est-à-dire la mise en danger d’autrui.
Article,
Le Monde, 2025